Tournon-sur-Rhône . Médiathèque
Dernière pièce urbaine de la place Jean Jaurès, située à son extrémité Ouest, la future médiathèque pose la question de son rapport immédiat à l’espace public, et à la relation frontale qu’elle entretiendra avec la halle contemporaine afin de définir une cohérence urbaine équilibrée.
Elle pose aussi plus largement la question de son ancrage dans le territoire, interrogeant son environnement proche et moins proche afin de percevoir les marqueurs et les caractéristiques propres à sa situation qui permettront de définir une identité en accord avec la place, avec Tournon-sur-Rhône avec un lieu dédié au plaisir de l’échange et au plaisir de lire.
Enfin elle pose la question de ce que doit être une médiathèque de nos jours, en questionnant les sujets des nouveaux usages, la place du numérique, de nouveaux lieux d’échanges, de sa capacité à pouvoir évoluer avec son temps, de son impact face aux enjeux climatiques.
Les bibliothèques pouvaient autrefois s’apparenter à des sanctuaires sacrés, hauts lieux de l’apprentissage et de la culture réservés à un public averti et dont les frontières semblaient être jalousement gardées, elles paraissaient protéger des espaces sanctuarisés d’un extérieur envahissant, hors du temps: de vastes étendues silencieuses paralysant le plaisir de l’échange et la simplicité du mouvement vers l’autre.
Si urbainement la médiathèque par sa matérialité et sa massivité offre bien une présence protectrice pour son contenu culturel, celle-ci est contrebalancée par la générosité de ses ouvertures qui permettent de percevoir ce qui se joue en son sein.
La façade principale, vernaculaire et contemporaine à la fois, réinterprète les codes des équipements publics classiques lui conférant un caractère institutionnel immédiatement identifiable.
Ainsi sa parfaite symétrie s’aligne avec l’axe de la place Jean Jaurès et de la halle. L'habituel perron menant à l'entrée est repensé en gradins, étendant ainsi les possibilités d'utilisation de la place pour des événements publics. Le grand cadrage permet non seulement d’établir un lien visuel direct avec l’intérieur de l’équipement mais aussi d'offrir une vue sur les coteaux depuis la place grâce à une seconde ouverture dans le mur du fond, côté Ouest.
À l'intérieur, le projet a pour ambition de libérer le programme des contraintes habituelles d'une médiathèque classique. En effet, la disposition traditionnelle et l'organisation rationnelle et systématique des rangées d'étagères homogènes, par leur rigueur et leur austérité, contredisent ce qui devrait être un lieu de plaisir dédié à la lecture.
Pour redéfinir les codes de cet espace et offrir des lieux inspirant le désir d'échange et de générosité, le projet s'inspire de la beauté des coteaux de vignes environnant Tournon.
Ainsi, prolongeant le paysage des vignes visible à travers le grand cadrage réalisé sur la façade Ouest, le projet propose un paysage intérieur aménagé en terrasses, délimitant naturellement des espaces distincts pour chaque section de la médiathèque. La manière de circuler dans le bâtiment devient ainsi un élément primordial dans la mise en condition de l’utilisateur. Les différences d’altimétries permettent des points de vues inédits entre les sections, et offrent une lecture claire et immédiate de l’organisation des sections. L’espace est ascendant, polarisé, occupé de manière presque organique. Accueil, terrasses, gradins, escaliers se succèdent naturellement.
La matière joue un rôle essentiel aussi bien dans l’intégration urbaine du projet que dans l’ambiance ce paysage intérieur. La mise en œuvre d’une technique ancestrale : le Pisé qui jouera le rôle de régulateur de température au sein du projet , et l’utilisation d’un béton « ultra bas carbone » innovant s’apparentant visuellement au pisé ou aux murs en terre crue, convoquent une naturalité rappelant la minéralité des murs de soutènement des coteaux. L’utilisation omniprésente de ces matériaux naturels laissés à nu vise à inspirer une ambiance calme et sereine, favorisant la lecture. Dans les sections enfants nous proposons même des alcôves de lecture « cachées » dans les murs qui prolongeraient l’imaginaire de ce paysage dans la profondeur de la matière.
Au sein de ce paysage de plateaux se déploie un système de rangement et de classification imaginé pour le projet, inspiré lui aussi par le paysage de vignes et proposant une grande diversité de typologies d’étagères capable de répondre à chaque situation, jouant avec le relief, avec les vues, créant des alcôves. Cette spécificité du mobilier, cohérente avec l’idée de paysage intérieur et rompant avec la standardisation habituelle, renforcera l’identité du lieu. Un lieu capable de diffuser, d’animer, d’accueillir, d’éduquer autour des savoirs et des cultures.